Actuellement en étape à Dharamsala, nous avons visité le musée du Tibet. Une belle opportunité de connaitre les raisons qui conduisent de nombreux tibétains à fuir leur pays et trouver refuge en Inde, au Népal ou au Bouthan. Cet article est le résultat de ce que nous avons lu et compris. Le gouvernement chinois a également son propre point de vue sur la situation. A vous de juger. Nous, on reste encore abasourdis.
Où se situe le Tibet?
Tibet: introduction
Le Tibet est communément appelé le « Toit du monde », le pays s’étend sur près de 2500 kilomètres de l’ouest à l’est. Aujourd’hui, on considère qu’il y a environ 6 millions de tibétains à travers le monde.
Le bouddhisme fut introduit au Tibet durant le 7ème siècle remplaçant la religion native : Bon. Le bouddhisme fait partie inhérente de la culture tibétaine, presque toutes les familles détiennent des images de divinités bouddhistes. Un petit nombre de tibétains pratique encore Bon, il y a également des musulmans et des chrétiens.
I – Le Tibet, un pays indépendant ?
Pendant plus de 2000 ans, le Tibet fut un pays indépendant comprenant un gouvernement, une fonction publique, un système judiciaire, une monnaie, une armée ainsi qu’une force de police.
Les relations entre Le Tibet et la Chine sont anciennes, les deux pays ont vécu sous les régles établies par d’autres empires mais le Tibet n’a jamais fait parti de la Chine. A la fin du 19ème siècle, les empires Russes et Britanniques ont commencé à avoir de l’influence au Tibet. En 1904 l’armée britannique envahit le pays ce qui a eu pour issue la signature d’une convention reconnaissant le Tibet comme un pays indépendant.
Ganden Phodrang, le gouvernement tibétain est mis en place en 1642 par le 5ème Dalai-Lama, Lobstang Gyatso, chef spirituel du pays. Il est installé dans le palais du Potala à Lhassa.
Le testament du 13ème Dalai Lama
Avant sa mort, le 13ème Dalai lama (1876-1933) averti dans son testament en 1931 sur les dangers pesant sur le pays par la diffusion du communisme. L’actuel Dalai lama, était uniquement âgé de 15 ans quand la pensée de son prédécesseur est devenu réalité.
II – L’invasion
En 1949, La Chine proclame la « libération du Tibet ». Elle envahit militairement le pays l’année suivante. Forte de ses 40 000 soldats elle attaque par surprise en trois points stratégiques: Derge, Riwoche et Sibda.
Les 6000 soldats de l’armée tibétaine ne font pas le poids et le gouvernement tibétain essaie de sortir de l’invasion par la négociation diplomatique.
En 1951, une délégation tibétaine envoyée afin de négocier avec le gouvernement chinois se voit forcée selon le gouvernement tibétain en exil à signer un accord de 17 points qui déclare la « libération dans la paix » et l’annexion du Tibet par la Chine.
III- La destruction
Monuments, écrits, sculptures
Depuis l’occupation du Tibet par Beijing, 6000 monastères et institutions religieuses ont été détruits. Les quelques monastères restant aujourd’hui et ceux rénovés par les tibétains eux-même sont essentiellement utilisés à des fins touristiques et non comme centre centre spirituel.
Les anciens écrits religieux, les images et les sculptures ont été détruits, fondues ou vendues sur le marché international.
Culture et langue : Acculturation
La langue tibétaine joue un rôle crucial dans la préservation de la culture tibétaine et la distinction de l’identité tibétaine. Les écoles tibétaines et l’immersion des jeunes dans leur culture et leur langage fait fasse à de sévères restrictions.
Le gouvernement chinois remplace les livres tibétains par des livre chinois malgré le fait que les étudiants apprennent mieux les sujets scientifiques dans leur propre langage.
Les deux formes les plus visibles de la répression politique sont les restrictions sur la liberté de croyance et la rééducation patriotique. Les moines et nonnes sont forcés à renier le 14ème Dalai Lama et prêter allégeance au parti communiste.
Depuis novembre 2011, les portraits des dirigeants communistes chinois doivent être disposés dans tous les monastères.
Humains
Les tortures psychologiques et physiques subis par les tibétains pendant les manifestations, les interrogatoires et les emprisonnements est au delà de toute compréhension humaine. 1,2 millions de tibétains seraient morts exécutés, torturés, de faims ou encore en travaillant dans des camps.
La marginalisation économique: 70% des entreprises à Lhassa sont détenues où dirigées par des chinois. 40% des tibétains diplômés sont sans emplois.
Nature
Une autre destruction est celle de l’exploitation des ressources naturelles du Tibet.
La déforestation massive, l’extraction minière et la chasse excessive ont fragilisé l’eco sytème du pays. Certains plateaux du Tibet sont utilisés pour des tests nucléaires ou comme poubelles pour déchets nucléaires. L’impact sur l’environnement se fait sentir non seulement sur le plateau tibétain mais également en Chine et en Asie.
Les drogpas, nomades tibétains, sont au fur et à mesure sédentarisés au nom de la « protection environnementale ». Le gouvernement chinois les installe dans des camps, maisons en dur. On dénombre au moins 20 auto immolation de nomades.
IV- l’Exil tibétain
Depuis 1959, plus de 150 000 tibétains se sont enfuis. Des centaines d’entres eux sont décédés sur le chemin à cause des conditions difficiles ou des attaques chinoise. 50 ans après, des milliers de tibétains continuent à fuir.
Dans la nuit du 17 mars 1959, le Dalai Lama déguisé en soldat s’échappe de Lhassa, la capitale tibétaine, accompagné de sa famille et de nombreux autres tibétains.
Suite au soulèvement national du 10 mars 1959 et la fuite du Dalai lama environ 80 000 tibétains se sont échappés dans des pays frontaliers. Initialement gardés dans des camps de réfugiés et employés comme ouvrier routier dans le nord de l’Inde, la plupart d’entres eux se sont installés dans les communautés tibétaines en Inde, au Népal et au Bhutan.
Une administration ainsi qu’un parlement en exil ont très vite été établi après l’arrivée du Dalai Lama en exil. A travers ses institutions, la communauté tibétaine en exil préserve l’héritage tibétain.
Près de 80 écoles ont été construites en exil ainsi que 190 monastères et couvents.
Témoignage
« Durant l’hiver 1993, une équipe de rééducation chinoise est venue dans notre monastère. J’ai refusé d’obéir à leurs ordres et de renier le 14th Dalai lama. J’ai réalisé que je n’avais pas d’autre choix que de fuir. J’ai décidé de m’enfuir en Inde.
Quelques semaines plus tard, j’ai commencé mon voyage avec trois autres tibétains. Nous avons traversé une grande montagne en espérant éviter les patrouilles chinoises. Lors de la montée, nous avons été pris dans une grande tempête de neige et avons perdu notre chemin. Nos couvertures ont été emporté par la tempête et nous avons tous souffert d’engelures mais nous n’avions pas d’autre choix que de continuer à marcher.
Après 3 jours, nous avons atteint un campement de nomades tibétains au Sikkim. Nous étions totalement fatigués et souffrions d’extrêmes douleurs dues à nos engelures. Les nomades nous ont emmené à un centre médical de l’armée indienne. J’étais plus préoccupé à l’idée que les chinois soient informés plutôt que de m’inquiéter à propos de ma santé.
Nous avons été hospitalisé à Gangtok mais ma condition ne s’est pas améliorée. Après 6 mois, mes jambes et quelques uns de mes doigts ont été amputé.
Deux d’entre nous ont finalement été autorisé à aller à Dharamsala tandis que les deux autres, en meilleur santé, ont été reconduit au Tibet. »
V- Protestations: auto – Immolations
Consécutivement à la répression chinoise depuis 60 ans de nombreux tibétains ont commencé à protester par l’auto-immolation.
De février 2009 à Avril 2015, 138 Tibétains se sont auto-immolés.
Parmi eux, 1119 sont décédés tandis que la condition de ceux qui ont survécu reste incertaine.
Leur revendications? la liberté et le retour du Dalai Lama au Tibet.
Depuis 2015 les auto-immolations continuent, le magazine contact disponible en ligne recense toutes ces protestations.
L’accès restreint aux médias internationaux ainsi qu’aux touristes empêche la communauté internationale de comprendre la crise actuelle au Tibet.
VI- La disparition du Panchen Lama
Le 10ème Panchen-lama, Lobstang Trinley Lhundrup Choekyi Gyaltsen, est né en 1938 et fut reconnu comme la réincarnation du 9eme panchen lama en 1951. Traditionnellement, le Panchen lama est considéré comme l’un des plus grands leaders spirituel du Tibet après le Dalai lama.
Le 18 mai 1962 le 10eme Panchen Lama adressa un rapport critique, connu plus tard sous le nom « pétition à 70 000 caractères » détaillant les souffrances, tortures et les traitements inhumains infligés aux tibétains au nom de « clampdown on social unrest » and « democratic reforms ». Le gouvernement chinois répondit en l’accusant de révolte contre le parti et le retira de ses fonctions. Plus tard, en 1964, il est soumis à une séance de critique publique également appelée séance de lutte pendant 50 jours. En 1968, le gouvernement chinois l’emprisonne; il est relâché en 1977
En 1989, il décède à l’âge de 51 ans dans des circonstances suspectes.
Sa réincarnation, le 11eme Panchen Lama Gedun Choekyi Nyima est né le 25 avril 1989.
Il a été reconnu par le Dalai Lama comme la réincarnation du Panchen Lama le 14 mai 1995. Comme le veut la tradition, l’enfant a reconnu parmi nombres d’objets ceux du 10eme Panchen Lama. Trois jours après, il disparait ainsi que ses parents, enlevés par le gouvernement chinois. Ils n’ont plus jamais été vus en public.
Le gouvernement chinois a nommé son propre Panchen Lama, Gyaltsen Norbu, en 1995 .
Le grand problème posé par disparition: La reconnaissance mutuelle. La confirmation passe par une reconnaissance mutuelle entre les deux Lamas. Le Panchen-Lama est reconnu par le Dalai-lama tout comme le Panchen-lama reconnait la réincarnation du Dalai Lama. Avec la disparition du Panchen Lama, qui est habilité pour confirmer la réincarnation du prochain Dalai-lama? Le Panchen Lama désigné par les chinois?
